Les Républicains (ump) : Pour l’alternance à défaut de toute alternative. (Decryptage)

Publié le : 07 septembre 202120 mins de lecture

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« Si je suis battu le 6 mai, j’arrête la politique », Nicolas Sarkozy, le 08 mars 2012 sur RMC.

Nicolas Sarkozy, comme le reste de la classe politique actuelle, est habitué à ne pas tenir ses promesses et ne cesse de se contredire. Bien qu’ayant été battu le 6 mai 2012, l’ancien président de la république n’a alors de cesse de marquer son grand retour, à coup de tweet notamment. Elu président de l’ump, bientôt celui des républicains, à défaut de n’avoir jamais dirigé un mouvement d’union populaire il ne manque pas en revanche de s’accaparer la République. Mais trêve de considérations presque anecdotiques. L’UMP nouveau, ce n’est qu’un énième changement vers le même.

I – Les Républicains…


Dans la vidéo de présentation du Parti des Républicains (https://www.youtube.com/watch?v=gXW8utsQsWY) dont le titre « Il est temps de passer des promesses aux actes » annonce une pièce déjà jouée et rejouée, Nicolas Sarkozy nous explique quels sont, d’après lui et son parti, les « principes de bases de la République ». Mais, en y regardant de plus près, ce que le président des dits « républicains » énonce comme étant les fondations de la République ne sont en fait que les fondations et croyances du capitalisme libéral, destructeurs de la République.

A savoir :

1 :45 « La république c’est le respect du travail, ce n’est pas l’assistanat »

D’entrée, il n’hésite pas à user des vieilles rengaines de son école politique, à savoir qu’il y aurait d’un côté ceux qui travaillent et s’en donnent les moyens et de l’autre, ceux qui s’y refusent et préfèrent vivre, voire survivre, en dépendant du travail de l’autre.

A première vue, cela pourrait presque se tenir car il est vrai que le refus du travail, surtout lorsqu’il est nécessaire que ce travail ait lieu, passe par le fait de le faire faire à un autre plutôt que de le faire soi-même. Mais, il nous faudrait d’abord savoir de quel travail il est question ici. Il s’agit, en fait, uniquement du travail dans le cadre de l’emploi, c’est-à-dire le travail dans sa pratique capitaliste avec une pratique de la valeur capitaliste, qui nie notre condition de producteur. Or, si la pratique de la valeur n’était pas cantonnée à ce qui peut être produit dans le cadre du « marché du travail », et que tout travail était reconnu comme producteur de valeur, car il n’y a que le travail humain qui produit de la valeur économique, nous constaterions que ces « assistés » lorsqu’ils participent à la vie sociale, dans des associations, des clubs, des partis ou bien lorsqu’ils créent du savoir, construisent des bâtiments à titre particulier ou associatif par exemple, produisent bel et bien de la valeur économique.

Mais alors, se pose la question de savoir qui n’en produit pas et surtout qui « consomme plus qu’il ne produit » ? A cette question nous trouvons nécessairement des réponses en jetant un ?il au CAC 40. De même, nous savons que chaque année l’évasion fiscale en France s’élève à environ 80 milliards d’euros… Qui sont les assistés et qui ruinent la France alors ? Les allocataires du RSA dont la qualité réelle de producteur de valeur est niée ou bien les représentant du Capital qui ne vivent que de la propriété lucrative, sans jamais travailler, y compris dans le cadre de l’emploi, ou qui, en tout cas, consomment plus qu’ils ne produisent. Tout cela n’est que le fruit de croyances dont il est nécessaire de s’émanciper.

1 :49 «  La République, c’est la liberté, ce n’est pas l’addition des normes, des règles, des statuts. »

Comprendre que la République, c’est en fait le capitalisme libéral dont les principes économiques fondamentaux, je le rappelle, sont la libre circulation des personnes, des biens et des marchandises. Ce qui est sous-entendu ici, c’est qu’ il « s’agit de défaire méthodiquement le C.N.R», bref de détruire les acquis des « jours heureux », comme le préconisait Denis Kessler, ancien vice-président du Medef. Là-encore, c’est une rengaine classique des libéraux… Moins de normes, de « charges » etc. Ce qui est attaqué ici, sous l’appellation notamment de « charges sociales », ce sont en fait les cotisations salariales, qui servent à construire les services publics tels que l’hôpital et l’école et à offrir un salaire au personnel hospitalier. Donc, qui dit moins de charges, de normes, etc. dit aussi moins de services publics, plus de privatisations, moins d’hôpitaux, d’écoles, de médecins, privatisation de la Poste etc.

1 :55 «  La République, c’est l’autorité, ce n’est pas le laxisme de Mme Taubira. »

A ce stade, intervient la seule distinction qui pourrait être crédible entre la droite au sens ancien, la droite réactionnaire ou bien même conservatrice, et la gauche libérale, à savoir le rapport à l’ordre et à l’autorité. Pour résumer, parce qu’il n’est pas question pour moi de m’étendre sur ces débats sociétaux sans fonds et qu’en y regardant de plus près, l’alternance tant vantée n’est qu’apparence… Nous pourrions dire que Nicolas Sarkozy et son parti sont prêts à s’attaquer « aux faiseurs de troubles plutôt qu’aux fauteurs de troubles » pour reprendre une expression du sociologue et urbaniste Jean-Pierre Garnier. Préférer s’attaquer au symptômes plutôt qu’aux causes en alimentant la guerre civile qui vient…

1 :59 «  La république, c’est la laïcité, ce n’est pas l’acceptation du prosélytisme et du djihadisme. »

Enfin, Nicolas Sarkozy conclut sur un sujet qui donne des frissons à des millions de Français depuis déjà plus d’une décennie et plus encore depuis l’attentat du Charlie Hebdo. Essayons de recentrer le sujet sur le réel, à partir de ce qui vient d’être écrit plus haut. Le capitalisme, n’est constitué que de croyances : sur la propriété comme production de valeur, sur le travail reconnu uniquement dans le cadre de l’emploi soumis au « marché du travail », sur le crédit etc. Il y a là un défaut réel de laïcité et Nicolas Sarkozy n’a eut, ici, de cesse de faire du prosélytisme[1]…

Mais pour se situer sur le terrain dont il semble être question pour l’ancien président de la République, il serait intéressant qu’il définisse ce qu’est le « djihadisme », ce néologisme sans contenu véritable.
Plus encore, Nicolas Sarkozy et ses compères font-ils preuve de laïcité lorsqu’ils s’agenouillent devant le Capital, les banques, Bruxelles ou bien le Crif ?

Nous constatons donc que la « République » que nous propose M.Sarkozy et ses pairs et camarades, est en fait l’antithèse de ce qui fonde réellement la République et ce pourquoi d’ailleurs celle-ci tend de plus en plus à être décriée, aussi bien par la réaction qui la surnomme « la gueuse » que par la gauche du capital soucieuse malgré tout de maintenir le fétichisme de la marchandise. Le modèle qui nous est proposé ici, c’est le modèle prétendument Républicain, à l’américaine. Le jogger invétéré, équipé de t-shirt NYC et de Ray ban qu’est Nicolas Sarkozy, dont le fils étudie d’ailleurs dans une école militaire états-unienne n’a que faire des principes républicains. En réalité, il n’est une fois de plus que la marionnette d’un bouleversement politique et économique qui prend forme petit à petit dans l’alliance transatlantique. Bientôt, ces mascarades que sont les élections en gouvernement faussement représentatif, pourront être ramené à une seule et même élection, toujours manipulée, mais dont le siège central se trouvera à Washington…

Il est de bon ton, il me semble, alors, de rappeler que la République est d’abord sociale. Elle est le fruit d’institutions, et du partage dans la communauté, elle est « la chose publique », qui préexiste bien avant les définitions qu’un Peillon ou un Sarkozy peuvent en donner[2]. La République, c’est une société avec Etat, mais un Etat construit et au service du peuple qu’il ne faut pas confondre avec les appareils d’Etat, qui nous privent de notre liberté et nous oppressent, là où l’Etat agrandit mon domaine de liberté et mes libertés politiques. Aujourd’hui, l’Etat réel est un manque en France, car c’est un système économique sauvage qui règne et une mafia politique qui dirige, car là où il n’y a plus d’Etat c’est la mafia (pas celle de quartier..), l’armée, les clergés ou le chaos qui dirigent.

Pour synthétiser, comme l’a montré Regis Debray, la République prend forme dans des lieux clés et représentatifs que sont : l’école, la mairie, l’Assemblée. La république est transmission et « dans l’enfant, cherche l’homme et ne s’adresse en lui qu’à ce qui doit grandir, au risque de le brimer. [3]» L’inverse en fait, de ce que nous proposent Sarkozy et son parti.

II – L’alternance à défaut de toute alternative.

Plus tard, le 15 Mai dernier, une seconde vidéo, promouvant le nouveau parti et l’alternance a été mise en ligne sur Youtube et lé réseaux sociaux : https://www.youtube.com/watch?v=aEvkW_3yflQ. – je vous laisse remarquer les similitudes dans le montage, la réalisation, la musique, le discours, les tons avec la campagne de 2012 du P.S qui clamait « le changement, c’est maintenant ». Je me concentre ici sur le discours de fond, il y aurait trop à écrire sinon.

Cette fois, Nicolas Sarkozy n’est plus seul à prendre la parole, Laurent Wauquiez, Christian Estrosi ou encore Nathalie Kosciusko-Morizet, défilent tour à tour pour nous faire une proposition des plus originale : l’alternance. Le Parti Maastrichtien Unique n’a de cesse de poursuivre la même politique, avec les mêmes slogans, tout en voulant nous faire croire qu’un renouveau est en marche.

En 2007, « ensemble, tout était possible », en 2012 « Le changement, c’était pour maintenant », en 2015 « l’alternance est en marche ». En somme, nous avons là une véritable courroie de distribution d’un flot continuel d’une politique identique qui revendique le changement. J’expliquais d’ailleurs à l’époque où le hollandisme faisait fureur, que le changement n’était par définition que le renouvellement du même[4]. Il en va de même pour l’alternance. L’alternance n’est que le maintien perpétuel du même, par essence. L’alternance c’est la proposition de la continuité plutôt que l’alternative, qui se place en rupture avec ce qui a été, pour justement proposer ou placer autre chose dans un mécanisme qui a vocation à disparaître.

Dès lors, il n’est plus étonnant de constater que les discours tenus dans cette vidéo, malgré les milliers d’heures de cours en communication, demeurent identiques à ceux passés.

0 :19 « L ‘alternance est en marche et rien ne l’arrêtera. » Nicolas Sarkozy

Comme à son habitude, Nicolas Sarkozy ne manque pas d’assurance et suis la trajectoire qui lui est indiqué par le Capital pour que la pièce de théâtre perdure. Nous nous souvenons de ce discours du 16 Janvier 2009 où il prononçait ses v?ux aux corps diplomatiques étrangers sur un ton tout aussi serein en déclarant : «  Nous irons ensemble vers ce nouvel ordre mondial, et personne, je dis bien personne, ne pourra nous en empêcher. » Ce Nouvel Ordre Mondial, qui bien loin d’être un projet ésotérique et mystique qui serait organisé par certains « Illuminés », existe bel et bien, et s’incarne par la prise du pouvoir du Capital, et la mise en place d’une union transatlantique, sans prendre en considération l’avis de la population, maintenue à l’écart. Plus encore, son ton en est presque menaçant, comme si une fois de plus, rien ni personne ne pouvait ou n’avait intérêt à se dresser devant cette alternance, afin de poursuivre la politique unique qui se met en place actuellement.

0 :51 «  Les départements ont été gagnés par des candidats qui croyaient dans les valeurs de l’alternance »Gerald Darmanin

Soit cela ne veut rien dire, soit au contraire cela veut tout dire au regard de ce que j’expliquais plus haut à propos de l’alternance. J’en reste là, pour ce discours vide.

1 :05 «  L’opposition peut incarner un nouvel espoir (…) en corrigeant les dérives de l’assistanat, en commençant à travailler sur une baisse de la dépense publique. » Laurent Wauquiez.

Je ne vais pas vous faire le plaisir de revenir sur « l’assistanat », l’essentiel a été dit. Ce qu’il est intéressant de remarquer en revanche c’est l’utilisation de la rhétorique visant à nous faire accepter tout simplement une politique d’austérité et de paupérisation… Cela se traduit notamment par la destruction de la cotisation sociale et des acquis du C.N.R nous l’avons vu. Mais aussi pour rembourser une dette, prétendument publique, mais en fait privée[5] et fruit d’une soumission affligeante de la part des gouvernements successifs qui n’ont eu de cesse de liquider les pouvoirs régaliens de l’Etat. La réalité est d’ailleurs bien différente, elle est que la France, aujourd’hui encore est un pays riche, l’un de ceux qui se porte le mieux. Mais l’idéologie dominante a besoin de créer un système de représentations dans lequel nous devons nous penser en faillite, dans le but d’accepter les mesures d’austérité et de vendre petit à petit notre patrimoine[6]…

2 :00 «  L’apprentissage, les lycéens professionnels, la formation, l’activité économique, ce sont les régions qui ont ces compétences désormais. » Gerald Darmanin, tout-sourire.

Une fois de plus, il est ici question de montrer l’intérêt qu’il y a à renforcer le pouvoir économique et politique des régions. En effet, la politique mondialiste vise à renforcer le pouvoir des régions partout en Europe tout en affaiblissant l’Etat-Nation le projet réel étant la dislocation par elle-même de l’Union Européenne, qui n’était qu’un rouage d’un mécanisme plus important, remplacé par l’alliance transatlantique, contre les Etats. L’UE est morte, vive l’UE en somme, au travers du Tafta et des Euro-régions.

2 :42 «  Maintenant, nous devons continuer, préparer le projet, fonder une formation politique… » Nicolas Sarkozy

Puis, vient le clou du spectacle ! Nicolas Sarkozy nous annonçant clairement qu’il n’y a aucun projet. Pas d’autre projet que celui de « continuer » et de mettre en marche l’alternance.

Avant de conclure à 3 :43 : «  Nous avons besoin de vous, parce que la France a besoin de chacun de ses citoyens… » Je vous invite à consulter les images. Lorsqu’il dit « vous », M.Sarkozy s’adresse bien à nous qui regardons cette vidéo, mais par la suite sa gestuelle indique que par « la France » c’est de lui dont il parle. En fait, Nicolas Sarkozy a besoin de vous, besoin qu’une fois encore une majorité lui fasse confiance aveuglément, après plusieurs minutes de discours flou par-dessus une musique entraînante.

Nous pouvons donc amèrement constater qu’une fois encore, s’il y a quelques changements de forme, de nom, et de slogans, le discours de fond demeure inchangé. Aucune alternative ne semble possible, aucun basculement, la trajectoire semble toute tracée et gare à ceux dont on dit qu’ils « dérapent » dès lors qu’ils n’osent plus se prosterner devant l’idéologie dominante qui impose ses codes et représentations qui, bien ancrée nous empêche de construire tout appareil critique face à la langue de bois et nous condamne à accepter l’alternance du même.

Rappelons-nous, avec Gramsci, que la « phase hégémonique du capitalisme » correspond précisément à ce moment où chacun, sans s’en rendre compte, notamment lorsqu’il croit lutter contre, adhère finalement au discours sur le réel proposé par la classe capitaliste, ces fameux 1%. Néanmoins, des solutions et alternatives existent. L’auto-mouvement de la conscience prolétarienne[7][8]combinée au dépérissement de l’appareil capitaliste, peut nous conduire à une modification concrète de l’organisation sociale et de la société.

« Là où croît le péril, croît aussi ce qui sauve » Hölderlin

« Sans théorie révolutionnaire, pas de pratique révolutionnaire. » Lénine

Loïc Chaigneau, pour l’Affranchi.
©2015 – tous droits réservés.

_________________________

[1]             Voir : Religion capitaliste et laïcité : https://www.youtube.com/watch?v=3vW8EoVUaEo

[2] Ni Platon, ni les Romains, pour ne citer qu’eux, n’ont attendu les considérations de MM. Peillon et Sarkozy, entre autres.

[3] http://laicite-aujourdhui.fr/?Etes-vous-democrate-ou-republicain

[4] http://loicchaigneau.blogspot.fr/2013/04/le-changement.html

[5] Cf : https://www.youtube.com/watch?v=76BvsYRNjf4

[6] https://www.youtube.com/watch?v=Wnjo_vwylJs

[7] « les prolétaires », c’est à dire les 99%. Nier ce terme qui semble « depasser » mais qui décrit une réalité concrète serait succomber au piège décrit plus haut.

[8] CF. Georg Lukacs – Histoire et conscience de classe.

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