La politesse – #2 Le Concept de Philo

Rubrique mensuelle d’éducation populaire : le Concept de Philo. Article du mois de mai 2014 Nous sommes tous des hommes politiques. Quand je dis hommes politiques, c’est bien au sens où l’entendait Aristote lorsqu’il écrivit que « l’homme est par nature un animal politique ». Plus tard, avec les théories du contrat et la Révolution française, certains distingueront l’homo politicus ou citoyen de l’homme tel qu’il a pu être à l’état de nature, avant toute société ou tout contrat. Néanmoins, nous pouvons convenir aujourd’hui, et peut-être plus que jamais grâce notamment à internet, que nous sommes tous des hommes politiques, tout comme la politique nous appartient à tous et non pas uniquement aux professionnels de la politique, trop souvent appelé à tort « hommes politiques ». Dès lors, en tant qu’être social, vivant en société, nous sommes sans cesse confrontés aux autres – à la famille, aux amis, aux collègues, mais aussi à une multitude d’inconnus avec lesquels nous nous devons de vivre sans quoi il y aura une guerre civile permanente. Or, vivre avec ses semblables n’est pas chose si évidente et les problèmes que cela engendre ne sont pas méconnus : promiscuité, tensions, irritabilité etc. De nos jours et dans les villes, qui concentrent à elles seules plus de cinquante pour cent de la population mondiale, la promiscuité est de plus en plus présente dans les lieux de vie les plus communs comme les transports où les cinémas. Nous constatons alors qu’il est difficile pour l’Homme, de fait Homme politique, de côtoyer ses semblables en paix. D’un côté, il nous est impossible de vivre seul, sans semblables et dans le même temps les rapprochements trop important nous conduisent à des états de nervosités et parfois même d’agressivité. Si cette « insociable sociabilité » caractéristique de l’Homme dont parlait Kant peut conduire parfois à l’art et au génie, il n’en demeure pas moins que le plus souvent elle est l’occasion de conflits vains. Pourtant, si nous constatons, en France notamment et dans d’autres pays occidentaux cette tendance à ne plus supporter l’autre en y opposant un « Moi » qui aurait tous les droits – chaque sortie en ville peut nous le faire constater, il n’en va pas de même dans l’ensemble des pays du monde. Je pense notamment ici au Japon, règne de la promiscuité mais règne aussi du respect. Le « Moi » tout-puissant ou presque d’une culture individualiste et marchande a fini par chez nous de détruire le chouïa de respect, d’éthique et surtout d’humanité propre qui pouvaient rester. Le plus malheureux étant peut-être que cette culture du « Moi » qui revendique une estime de lui-même plus haute que jamais s’avère en fait être une estime bien négative et non positive. En effet, après plusieurs études et recherches, il a été constaté que l’estime de soi peut prendre deux versants, l’un positif, c’est lorsque nous avons confiance en nous-mêmes et que nous sommes en mesure d’accomplir nos projets et prêt dans le même temps à s’ouvrir aux autres et à avoir des relations harmonieuses, l’autre, beaucoup plus négatif, lorsque l’on s’affirme uniquement en opposition par rapport aux autres et par dévalorisation de l’autre. C’est ce deuxième pan de l’estime de soi qui semble malheureusement dominer aujourd’hui. Et si alors, plutôt que d’attaquer sans vergogne aucune notre semblable, nous trouvions un juste milieu, semble-t-il trop oublié aujourd’hui, qui nous permettrait de vivre en paix ? Et si cette réponse, toute idiote allez-vous me dire, s’appelait la politesse ? En effet, celle-ci n’est plus transmise aux enfants par les parents, l’enfant-roi en étant la plus grande manifestation, plus non plus par les professeurs trop occupés à théorisés sur le genre et cela aboutit à une pure insociabilité pure et simple… Loin de moi alors l’idée de remettre sur le devant de la scène le maître à la baguette et le père plus qu’autoritaire, j’aimerais simplement rappeler que la politesse est ce juste milieu qui nous permet de vivre ensemble sans avoir à parler sans cesse de « vivre ensemble » au sens où il faudrait nous y forcer dans des conditions exécrables. Trop de politesse, tue et assassine la politesse, mais pas assez c’est la société et les hommes, de fait politiques, que cela abat ! Pour mieux comprendre l’importance que revêt la politesse, branche de l’éthique, je cède mes mots à Schopenhauer qui décrivit bien mieux que moi dans Parerga et Paralipomena , tout l’enjeu de la politesse par le recours à une métaphore qui vous restera sans doutes en tête : « Par une froide journée d’hiver un troupeau de porcs-épics s’était mis en groupe serré pour se garantir mutuellement contre la gelée par leur propre chaleur. Mais tout aussitôt ils ressentirent les atteintes de leurs piquants, ce qui les fit s’écarter les uns des autres. Quand le besoin de se réchauffer les eut rapprochés de nouveau, le même inconvénient se renouvela, de sorte qu’ils étaient ballottés de çà et de là entre les deux maux jusqu’à ce qu’ils eussent fini par trouver une distance moyenne qui leur rendît la situation supportable. Ainsi, le besoin de société, né du vide et de la monotonie de leur vie intérieure, pousse les hommes les uns vers les autres ; mais leurs nombreuses manières d’être antipathiques et leurs insupportables défauts les dispersent de nouveau.  La distance moyenne qu’ils finissent par découvrir et à laquelle la vie en commun devient possible, c’est la politesse et les belles manières. En Angleterre on crie à celui qui ne se tient pas à cette distance : Keep your distance ! Par ce moyen le besoin de se réchauffer n’est, à la vérité, satisfait qu’à moitié, mais, en revanche, on ne ressent pas la blessure des piquants. Cependant celui qui possède assez de chaleur intérieure propre préfère rester en dehors de la société pour ne pas éprouver de désagréments, ni en causer. » Loïc Chaigneau pour l’Affranchi.
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